ORDRES DE CHEVALERIE par M. de La ROQUE

Un texte téléchargé du site de la Bibliothèque Nationale de France

Extrait du livre de Gilles André de la Roque: Traité de la NOBLESSE
A Paris, Chez Etienne MICHALLET - 1678

Des Ordres de Chevalerie en France
Des Ordres Militaires de la Grande Bretagne
Des Ordres militaires d'Espagne
Des Chevaliers de l'Acollade, ou de l'Accollée
Des Ordres d'Allemagne, et des États du Nord
Des Ordres d'Italie et du Levant
De l'Ordre des Chevaliers Hospitaliers du Saint-Esprit de Jérusalem
De l'Ordre des Chevaliers et Hospitaliers de Saint-Lazare de Jérusalem
De l'Ordre des Chevaliers Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem
De l'Ordre des Chevaliers Hospitaliers de Notre-Dame du Temple
De l'Ordre militaire et Hospitalier des Teutons de Notre-Dame de Jérusalem
De l'Ordre militaire et Hospitalier de Saint-Antoine d'Éthiopie, de Vienne, et de Saint-Russi
De l'Ordre Hospitalier du Saint-Esprit à Rome
De l'ordre des Chevaliers Hospitaliers du Croissant, et de l'Étoile en Sicile
De l'Ordre Hospitalier de Sainte Brigide, ou de Brecian en Suède
De l'Ordre Hospitalier des Martyrs Saint-Côme et Saint-Damian en la Palestine

Des Ordres de Chevalerie en France

Le premier des Ordres de France, dont je parlerai ici, est celui de la Côte de Geneste dont fait mention François la Louliette en son Histoire de Coucy, Pierre de Beloy et autres auteurs. Ils disent que Charles Martel maire du Palais institua cet Ordre l'an 726, après l'insigne victoire obtenue par les Français sur les Sarrazins. Pierre de Saint-Julien en ses Origines de Bourgogne dit que le Collier de cet Ordre était d'or à trois chaînes entrelacées de roses émaillées de rouge, où pendait une Geneste d'or émaillée de noir et de rouge; et que ces Chevaliers portaient un anneau d'or, auquel était gravée l'effigie d'une Geneste, Saint-Georges en était le Patron; et la devise, exaltat humiles, par allusion à la Coste de Geneste.
Monsieur d'Hérouval m'a communiqué des Lettres du Roi Charles VI, données à Paris sous son scel secret semé de fleurs-de-lis, le 18 de son règne l'an 1391, par le Roi signé Ferron; par lesquels ce prince permet à Victor de Liestervelde écuyer du pays de Flandres, de bonne et noble génération, de porter l'Ordre de Coste de Geneste, par tous les lieux, places, fêtes et compagnies ou il irait.
On attribue communément l'Ordre du Navire, dit d'Outremer, ou du Croissant dit des Argonautes, au Roi Saint-Louis, qu'il créa l'an 1269 pour combattre les nations infidèles qui portent le Croissant. Le Collier était d'or entrelacé de double croissants passés en sautoir, d'où pendait une coquille.
Les registres de la Chambre des Comptes contiennent des Lettres du Roi Jean, données en l'Abbaye de Royaumont au mois d'Octobre l'an 1352 par lesquelles il établit une société de Milice et Chevalerie, sous le nom de Notre-Dame (appelé de l'Etoile) en sa noble Maison de Saint-Ouen, près Saint-Denis en France; et un Collège de Chanoines, de Chapelains et de Clercs, pour célébrer le service Divin; et Sa Majesté leur accorda toutes les forfaitures et espaves qui arriveraient en son Royaume.
Étienne Pasquier écrit que cet Ordre fut institué sur l'exemple de l'Etoile qui conduisait les trois Rois Mages. La devise qui est remarquée par Philippes Moreau, contenait ces mots: Monsfrant Regibus astra viam. Le Collier était fait d'un tortil ou chaîne d'or à trois chaînons entrenoués de roses d'or émaillées alternativement de blanc et de rouge, où pendait une étoile recamée d'or.
Le Roi Louis XI pour attacher les Grands de son Royaume à son service par de nouveaux liens d'honneur et de piété, et suivant les dessins et la volonté du Roi Charles VII, son père, institua étant à Amboise le 1er jour d'août 1469 un Ordre de 36 Chevaliers de Nom et d'Armes, dont il se fit Chef et Souverain, et prit pour tutélaire et gardien l'Archange Saint-Michel.
Étienne Pasquier dit que le Collier de cet Ordre était fait de coquilles lacées sur doubles lacs de soie noire, assises sur des chaînettes ou mailles d'or, d'où pendait une médaille en ovale d'or, dans laquelle la figure de Saint-Michel était empreinte, combattant et foulant à ses pieds le Dragon. On a ajouté sous ce règne une Croix d'or échancrée et émaillée de blanc avec quatre fleurs-de-lis d'or en ses angles, et au centre de la Croix l'image du même Patron Saint-Michel. Le Roi François 1er, au premier Chapitre qu'il tint en septembre 1516, changea les éguillettes et noeuds de soie noire en longs fermeaux, et cordelières d'or, en mémoire de Saint-François; la devise, Immensi tremor Occani, par allusion au Mont de Tombelene et de Saint-Michel.
Le Roi Henry III pour une marque éternelle de sa piété et de la reconnaissance qu'il désirait rendre à Dieu, pour les bienfaits qu'il en avait reçus au jour de l'envoi du Saint-Esprit, ayant à pareil jour pris naissance est élu Roi de Pologne, et succédé à la Couronne de France, créa l'Ordre des Chevaliers et Commandeurs du Saint-Esprit l'an 1578, en décembre, dont la cérémonie se fit à Paris le 1er Janvier 1579. Ces Chevaliers doivent faire preuve de trois races paternelles pour le moins, et être Gentilshommes de nom et d'Armes.
Le collier de cet Ordre était premièrement composé de fleurs-de-lis d'or cantonnées de flammes émaillées de rouge, entrelacées de trois chiffres et monogrammes divers pareillement d'or, émaillés de blanc; mais le Roi Henry IV, en 1594 ôta les chiffres, en la place desquels il fit entrelacer des trophées d'armes, avec des flammes et des bouillons de feu. A l'avènement du Roi Louis XIII à la Couronne, on voulut entremettre la lettre L, au lieu d'un H, mais par la résolution d'un Chapitre on conserva la lettre H, pour le respect du Fondateur.
La Croix qui se met sur les Manteaux et sur les habits, était autrefois de velours jaune orangé. Elle a été faite depuis de toile d'argent échancrée, avec une colombe figurée en broderie d'argent, et aux angles, des rais et des fleurs-de-lis d'argent. La Croix de l'Ordre est d'or émaillée de blanc, de la même structure que la première, et elle est pendue à un ruban de taffetas bleu Céleste; la devise, Deo Duce et auspice, pour signifier que ceux qui porteront cet Ordre doivent espérer un bon succès de leurs entreprises, étant conduites par le Saint-Esprit.
Le Roi Louis XIII, fit pour les deux Ordres de Saint-Michel et du Saint-Esprit, des Ordonnances données à Paris en Janvier 1629 publiées en Parlement le 15 du même mois.
L'Ordre militaire de Notre-Dame du Mont-Carmel institué par le Roi Henry IV, en 1609, prend son titre du Mont-Carmel habité par les Prophètes Hélie et Elisée, comme il est porté au troisième Livre des Rois. Il est sous la règle de Saint-Augustin, et non de Saint-Basile, comme est celui des Carmes. Ces Chevaliers doivent s'abstenir de l'usage de la chair le jour de la quatrième ferie, qui est le mercredi; ils font voeu de chasteté conjugale, et d'obédience à leur Général, et font preuve de noblesse. La marque de cet Ordre est une Croix violette avec l'effigie de Notre-Dame du Mont-Carmel. La Croix d'or échancrée qu'ils portent est émaillée de couleur violette.
Par lettres données à Saint-Germain-en-Laye en novembre 1633, le Roi Louis XIII établit une Communauté en forme d'Ordre de Chevalerie sous le nom de Commanderie de Saint-Louis, pour les soldats estropiés à la guerre dans le service de Sa Majesté.
Pour venir aux autres Ordres institués par des Princes du Sang de France, je les rapporterai selon leur proximité à la Couronne; et je commencerai par l'Ordre de la Cordelière ou du Cordon, qui fut inventé par Anne de Bretagne Reine de France, pour des femmes veuves, qui faisaient preuve de noblesse, et qui portaient une Cordelière d'argent, dont elles entouraient leurs Armes.
Charles Duc d'Orléans institua l'an 1430, l'Ordre du Camaïeu ou Porc-Épic, composé de 24 Chevaliers qui devaient être nobles de quatre races. Le collier était une chaîne d'or en tortil, au bout de laquelle pendait un Porc-Épic d'or avec cette devise, Cominùs et eminùs, ce qui veut dire que cet animal avec ses pointes peut piquer de près et de loin ceux qui l'offensent. Chacun de ces Chevaliers portait un anneau d'or garni d'un Camaïeu ou pierre d'agate, sur laquelle était relevée la figure du Porc-Épic.
René Roi de Sicile et duc d'Anjou, établit le 11 d'Août 1464 l'Ordre du Croissant pour 36 Chevaliers Gentilshommes de quatre lignes. Leur collier était fait de chaînettes d'or enlacées d'un ruban de soie noire, avec cette devise, Los en Croissant, gravée sur un croissant d'argent qui est à la pointe du collier.
On attribue sans beaucoup de fondement à Jean, Duc de Bourgogne un Ordre du Fusil, ce qui se peut confondre avec celui du Duc Philippes le Bon son fils.
Pour l'Ordre qu'on appelle du Chardon de Bourgogne, la preuve en est incertaine.
Louis II, Duc de Bourbon Comte de Clermont, institua l'Ordre de l'Ecu d'or, dit de Bourbon, le jour de la Chandeleur de l'an 1369, étant à Moulins, pour 26 Chevaliers renommés en Noblesse. Ils portaient un écu d'or sur la poitrine gauche, et sur une robe de couleur bleue. La preuve en est dans un registre de la Bibliothèque du Roi.
Philippes Moreau dit que ce Prince institua en l'année précédente 1368, l'Ordre du Chardon Notre-Dame et de Saint-André. Le collier était fait de fleurs-de-lis et de chardons d'or et d'argent. La devise est ce mot, Espérance; mais ce dernier Ordre qu'on dit plus ancien se confond sans doute avec celui de l'Ecu d'or.
François 1er, Duc de Bretagne érigea l'Ordre de la Chevalerie de l'Epi. Le collier était fait d'épis de blé d'or joints en croix, et liés de lacs à chaînettes, où pendait une hermine au naturel, avec la devise du Duc Jean V son aïeul, à ma vie; la sienne était malomori quàm faedari, par allusion à l'hermine, qui aime mieux mourir que de se souiller. André Favin en parle.
Jean Froissart raconte que les deux Armées de France et d'Angleterre, étant prêtes à combattre entre Wirousosse et la Flamanquerie, quelques écuyers de bonne volonté du camp des Français requirent le Comte de Hainaut de les faire Chevaliers, ce qu'il fit; et comme il parut des lièvres qui excitèrent une huée et un grand cri des soldats, et qu'il n'y eut point de bataille, on les nomma Chevalier du Lièvre.
Louis Godefroy parle de l'Ordre de la Sainte-Ampoulle, dit de Saint-Rémy, qui porte une Croix d'or échancrée, émaillée de blanc, et chargée d'une Colombe, tenant en son bec la représentation de la Sainte-Ampoulle dont on se sert au Sacre des Rois.
Les Barons de Montmorency avaient l'Ordre du Chien, symbole de la fidélité. Le collier était fait de têtes de Cerf; la devise est ce mot Vigilis. Philippe Moreau, et André du Chesne en rapportent la preuve.
L'Ordre de la Vache de Béarn est attribué aux Comtes de Foix, Vicomtes de Béarn.
Celui du Lion aux Barons de Coucy.
Les Chevaliers de Beaucaire étaient faits par les Prélats et par les Barons de Languedoc.
L'Édit du Roi du mois de décembre 1671, fait mention de l'Ordre de Sainte-Christine de Somport.
Il parle aussi de l'Ordre de Saint-Louis de Bochereaumont.
L'Ordre de la Magdeleine fut établi en 1614 par Jean Chesnel sieur de la Charonnière Breton, le collier est fait de fleurs-de-lis d'or, selon André Favin.
Jean Chenu dit qu'il y a dans Bourges un Ordre de Chevaliers de la Table Ronde, sous l'invocation de Notre-Dame. Le collier est composé de cinq dizaines de grains noirs en fils de lacs de soie verte en forme de chapelet, il fut institué en mai 1486. On fait preuve de bonnes moeurs.

Des Ordres Militaires de la Grande Bretagne

Hieronymus de Urrea et Gotfredus attribuent l'institution du fameux Ordre de la Table Ronde mensae circularis, à Uterpandragon et à Artus son fils Rois de Bretagne, environ l'an 470. La devise qu'on joint à cette milice est un Dragon. Mais parmi la tradition on peut y avoir mêlé de la fable.
Henry II, Roi d'Angleterre, Duc de Normandie et Comte d'Anjou institua en 1174 l'Ordre du Saint-Sépulcre de Jésus-Christ, parce qu'il avait visité les saints lieux de Jérusalem. Le Pape Alexandre III l'approuva sous la Règle de Saint-Basile, selon Joseph Micheli. Il a été éteint par le Schisme.
L'Ordre de Saint-Georges ou de la Jartiere, ou du Bleu jartier, fut établi par Edouard III Roi d'Angleterre en 1347 pour 26 Chevaliers, en faveur d'Alix Comtesse de Salisbery, comme rapporte Polidore Vergile. La devise de cette Jartiere qui tomba au milieu du bal dans Bourdeaux, est tirée d'Ovide, Nobilitas sub amore jacet. Guillaume Cambdenus en tire l'origine des victoires que remporta le Roi Edouard sur le Roi Jean, et sur David Roi d'Écosse.
La Jartiere, selon le sentiment d'Amian Marcelin, signifie l'Enseigne Royale, sur quoi les ennemis de Pompée prirent sujet de lui reprocher qu'il affectait la Jartiere, c'est-à-dire la puissance Souveraine désignée par le mot Tania.
Guillaume Dethicus, principal Roi d'Armes de la Jartiere, et Aubert le Mire, attribuent la première invention de cet Ordre à Richard Ier Roi d'Angleterre et Duc de Normandie, surnommé Coeur-de-Lion, lorsqu'il était en Chypre et à Acon.
La Jartiere de cette milice qui s'applique au genou gauche, est de soie de bleu céleste, brodée d'or, et quelquefois couverte de perles et de pierreries, avec une boucle ou agrafe d'or, l'inscription est honni soit qui mal y pense. Malè vertat ci qui malè cogitat. En cérémonie les Chevaliers portent au col un grand collier, qui est une Jartiere à plusieurs doubles, entremêlées de roses blanches et rouges. Guillaume Cambdenus dit qu'il fut augmenté par Henry V Roi d'Angleterre, de roses nouées et entrelacées de noeuds en lacs d'amour de soie noire, et au lieu de ces noeuds, Jacques Roi de la grande Bretagne, y fit mettre des chardons d'or tirés de l'Ordre d'Écosse. Au bout du grand collier pend un émail qui contient l'image de Saint-Georges à cheval, ayant un Dragon à ses pieds. En 1626 fut fait un règlement que les Chevaliers porteraient la Croix rouge de Saint-Georges pendante à un ruban de soie bleue, et presque en même temps on y ajouta l'Étoile d'argent qu'ils appellent le Soleil de gloire.
L'Ordre du Bain fut érigé en 1399 par Henry IV Roi d'Angleterre. Guillaume Cambdenus en rapporte ainsi la cause. Ce Roi étant au bain fut averti par un Chevalier, qu'il y avait deux femmes veuves qui lui demandaient justice; de sorte qu'il sortit incontinent du bain disant qu'il fallait préférer la justice qu'il était obligé de rendre à ses sujets, à la récréation du bain; et ensuite il institua cet Ordre de Chevalerie. Les Statuts disent que c'est pour acquérir une pureté de coeur, et afin d'avoir l'âme munde et des conditions honnêtes. Les Chevaliers portent un ruban rouge en écharpe. Mathieu Paris, et Edouard de la Bisse en ses notes sur Nicolas Upton, en parlent au sujet de l'Ordonnance pour faire de nouveaux Chevaliers. Par les Lois d'Angleterre, les Chevaliers mineurs de cet Ordre sortaient de tutelle, tant à l'égard de leur bien, que de leur personne.
Il y a des Chevaliers dorés en Angleterre, Equites aurati, auxquels on baille l'éperon doré pour marque de Chevalerie.
Deux autres Ordres ont paru autrefois dans cette Ile, l'un appelé de l'Epi, Ordo Spicae. L'autre de la Corde ou du Cordon, Funis militia.
L'Ordre du Chardon ou de la Rue de Saint-André a été institué en Écosse par le Roi Jacques V pour la défense de la Religion Catholique, et la protection des pauvres. Les Chevaliers de cet Ordre portent un cordon d'or à plusieurs noeuds, dans lesquels sont entées des fleurs de chardon et des feuilles de rue, et est attachée au bas de ce collier l'image de Saint-André Patron d'Écosse, tenant devant lui la Croix en sautoir de son martyre qui est la Colonelle représentée aux Bannières, Pennons, et Etendards des Écossais, depuis que S. Rieul vint de Grèce en Écosse l'an 369 et qu'il y apporta des reliques de ce Saint Apôtre. Jean Lesley a fait un traité de cet Ordre, en parlant de Rebus Scoticis.

Des Ordres militaires d'Espagne

L'Ordre de la Toison d'or est le plus illustre qui soit maintenant en Espagne, et dont le Roi Catholique est le Chef.
Guillaume Paradin, Louis Guichardin et Enguerrand de Monstrelet disent que Philippe-le-Bon Duc de Bourgogne institua à Bruges le 10 janvier 1429, un Ordre de Fraternité sous l'invocation de Saint-André, pour 24 Chevaliers Gentilshommes de nom et d'Armes, depuis augmentés jusqu'à 31. Ce fut en mémoire du mouton à la toison, qui sauva Phryxus, et de la conquête des Argonautes à Colchos conduits par Jason. Ou ce fut en mémoire de Gédéon, qui avec 300 hommes combattit et défit les grosses troupes des Madianites, et délivra le peuple d'Israël.
Le collier de cet Ordre est d'or composé de doubles fusils entrelacés en forme de B avec des cailloux étincelants de rais et de flammes de feu; la figure du mouton ou toison d'or pendante au bas avec cette devise, Ante ferit quam flammamicet. Ce fut Jean Germain Évêque de Châlons-sur-Saône, et auparavant de Nevers, premier Chancelier de cet Ordre, qui fut Orateur du Duc Philippes au Concile de Basle en 1433 et qui obtint pour lui le premier rang après les Rois.
Les Ordres qui suivent ont pris leur origine en Espagne et autres lieux qui en dépendent.
Le premier et le plus ancien, qui est celui d'Eucina, fut institué en 722 par Garsias Ximenés Roi de Navarre, dit Josephus Micheli. La devise est une Croix rouge sur une chaîne. Mais on doute s'il y avait des Ordres de Chevalerie en ce temps là.
Sancius ou Sance IV Roi de Navarre, érigea à Nayara la Milice du Lis sous la Règle de Saint-Basile en 1023 en l'honneur de Notre-Dame, pour combattre les Mores, selon Servius Roman et Guarini sur l'année 1048. Les Chevaliers de cet Ordre portent l'image de l'Annonciation entre deux fleurs-de-lis, disent les Auteurs.
Alfonse VIII Roi de Castille fonda l'Ordre militaire du Sauveur en 1118 pour chasser les Mores, comme écrit Barbosa. Les Chevaliers portent l'effigie de Notre-Sauveur.
Un autre Ordre de Saint-Sauveur de Montreal fut institué au royaume d'Aragon en 1120 selon le même auteur.
L'institution de l'Ordre d'Avis, dit des Palmes, fut faite par Alfonse Ier Roi de Portugal, sous la Règle de Cisteaux en 1146 pour résister aux Mores. Le Roi Alfonse II leur donna la ville d'Avis dont ils prirent le nom. Leur étendard est marqué d'un château auquel sont joints deux poussins d'Aigles des deux côtés. Andreas Rosendinus a écrit de cet Ordre, dans les antiquités de la ville d'Evora.
L'Ordre d'Alcantara dans le Royaume de Léon porte le titre Sancti Juliani de Piro. Gomesius Fernandus le commença en 1156. Le Pape Alexandre III le mit sous sa protection Apostolique, et Lucius III l'approuva en 118.., et leur bailla la Règle de Saint-Benoit. Les Chevaliers portent la Croix verte florencée. Ferdinand Roi de Castille et de Léon établit leurs privilèges.
Les Chevaliers de Notre-Dame de Calatrava furent établis au Royaume de Tolède en 1158 à la faveur de Sance III Roi de Castille et de Tolède, par Raymon Abbé de Cirera en Pisoie, qui leur bailla la règle de Saint-Benoît et les constitutions de Saint-Bernard sous la filiation de l'Abbé de Morimond. Ils portent la Croix rouge fleuronnée, entravée de menottes bleues. Le Pape Paul III leur permit de se marier une seule fois, secundis nuptiis exclusis, qui était l'opinion de Tertulian, Hieronymus Mascarenas, et Onuphurius en sa Chronique ont traité de cette milice.
Ramire I Roi de Léon institua l'Ordre de Saint-Jacques en Galice dans Locrune en 1159. La devise est une Croix rouge. Les statuts de cet Ordre n'excluent point les bâtards dont le père est connu.
L'autre Ordre de Saint-Jacques de Spata ou de l'Épée au Royaume de Léon, fut établi par le même Ramire en 1160 pour résister aux Mores, et fut mis en 1175 sous la règle de Saint-Augustin. Les Chevaliers portent la Croix rouge fleuronnée au pied long en forme d'épée. Ils ne peuvent se marier sans la permission du Chef de l'ordre.
La Milice de l'Aile fut créée en 1165 par Alfonse 1er Roi de Portugal sous la protection de Saint-Michel pour chasser les Mores d'Espagne. La Noblesse de sang y est exactement requise. Cet Ordre est sous l'institution de Citeaux. Leur devise est faite d'ailes, et ils dépeignent Saint-Michel avec des rayons de pourpre.
L'Ordre de Saint-Julien du Poirier au Royaume de Léon fut institué en 1178. Les Chevaliers portent une Croix verte florencée, échancrée et pattée, avec un écu d'or, au poirier de sinople, selon André Favin.
Joseph Micheli in thesauro militari, dit que l'Ordre de Saint-Georges d'Altama fut fondé en 1201 par Pierre II Roi d'Aragon.
Onuphrius, Vionus, Joannes Mariana mettent la fondation de l'Ordre de Notre-Dame de la Merci et rédemption des Captifs dans Barcelone en 1248 par Pierre de Nolasque. Cet Ordre fut confirmé en 1230 par le Pape Grégoire IX. La devise est une Croix pattée d'argent, et au-dessous les armes des Rois d'Aragon, qui font d'or à quatre paux de gueules.
Les Chevaliers de Truxillo en Castille furent fondés par les libéralités du Roi Alfonse le Sage en 1257 qui leur bailla la ville de Truxillo pour retraite. Ils sont agrégés à la Milice de Calatrava, selon Barbosa.
L'Ordre de Notre-Dame de Montese dans le royaume de Valence, fut créé en 1316 et approuvé par le Pape Jean XXII en 1317. Les Chevaliers de cet Ordre portent la Croix rouge, sont sous la règle de Cisteaux, font profession de garder les rivages de la Mer, et ont professé la chasteté jusqu'à ce que César Borgia Grand Maître prit dispense de se marier.
Denis Roi de Portugal institua en 1318, l'Ordre militaire de Christ, dont les Chevaliers sont sous la règle de Cisteaux: ils portent une Croix rouge pattée chargée d'une Croix blanche; demeurent en la ville de Tomar, et sont destinés pour combattre les Mores.
Le même Denis Roi de Portugal établit l'Ordre de saint-Jacques le Majeur dans la ville de Pormella; il porte la croix rouge en forme de glaive, suivant le récit d'Odoardus Nonius.
L'Ordre de la Bande fut institué en 1338 par Alfonse Roi de Castille, fils de Ferdinand et de Constance. La devise est une courroie ou bande rouge, large de trois à quatre doigts, qu'il fallait porter en écharpe. Les statuts obligeaient les Chevaliers de combattre contre les Mores, de n'aller qu'à cheval par la ville, d'être fidèles, et de ne dire aucun mensonge, et leur défendaient de converser avec des gens méchaniques, de jouer aux cartes et aux dés.
La Milice de Razon fut érigée par Jean Ier Roi de Castille en 1370 selon Hieronymus Roveanus.
L'Ordre de la Colombe fut érigé par le même Roi Jean de Castille, le jour de la Fête Saint-Jacques Patron d'Espagne en 1389. La marque affectée à cet Ordre est un collier d'or d'où pendait une colombe environnée de rayons.
Une autre Milice appelée de la Jura de las Azuzenas, fut érigée en Aragon en 1403 par le Roi Ferdinand. La devise est l'effigie de Notre-Dame de la Antiqua, entre deux fleurs-de-lis, qui pend à un collier d'or, dit Roveanus.
Le même Auteur parle de la Milice de Squamme, ou écaillé de poisson, Militia Squamma, destinée pour combattre les Mores. La devise est une Croix faite de Squammes, Squammis confecta.
Les Auteurs qui ont traité des Ordres qui suivent n'ont point employé de dates, et les précédents en quelques endroits sont fort incertains, ce qui n'en détruit pas la vérité, quoi qu'on ne sache pas le temps de leur institution.
Nous apprenons de l'Histoire de Franciscus Mottel de Luna que l'Ordre de la Hacha ou de la Hache fut érigé en Catalogne en mémoire de la victoire que remporta Raimon Berenger dernier Comte de Barcelone, sur ses ennemis, et parce que les femmes de Tortose avaient courageusement défendu leur Ville à coup de hache, et non les hommes, il fut ordonné que les femmes précéderaient les hommes aux actes publics, et que certaines exemptions de tributs seraient attachées à leurs personnes.
La Milice de Saint-Bernard a été renommée en Castille durant la guerre du Roi Henry contre le Roi Pierre le Cruel son frère; le Grand Maître de cet Ordre ayant pris le parti du premier qui monta sur le trône en 1367. Jean Mariana fait mention de cette milice.
Les Chevaliers de Jésus-Christ dont écrivent Bernardus Luce-Burgius et Joseph Micheli sont sous la règle que professent les Dominicains, et font voeu de combattre les Hérétiques.
Autre Chevalerie appelée du Rosaire, fondée à Tolède par l'Archevêque Roderic pour combattre les Mores, elle est sous la règle et constitutions de Saint-Dominique. Sa devise est l'image de Notre-Dame, et sa Croix est partie de blanc et de noir. André Favin en parle.
Charles-Quint Empereur fut auteur en 1535 de la Milice de Bourgogne. Ce fut à son retour d'Afrique où il subjugua le Royaume de Tunes; le Collier de l'Ordre est d'or, d'où pend le sautoir de couleur rouge de Bourgogne, symboles de Saint-André. Mennenius en fait la description.
Les auteurs espagnols ajoutent des Ordres qui sont aux Indes, comme celui de Tenclides ou Limensis, pour garder les frontières à Lima, et qu'on appelle aussi l'Auriculaire, celui de Nengor ou Nengori au Japon.
L'Ordre de Montjoie en Jérusalem, a paru en Espagne contre les Infidèles, de même qu'au Levant.

Des Chevaliers de l'Acollade, ou de l'Accollée.

On sait que la Chevalerie est une qualité d'honneur, que les Rois donnent à ceux qu'ils veulent élever par dessus les autres; mais la plus ancienne Chevalerie, et qui se confère par tous les Princes Chrétiens, est celle de l'Acollade ou de l'Accolée. Elle est ainsi appelée, parce qu'elle se confère avec des baisers et des accolades, et autres caresses. D'où vient que les embrassements que le Prince fait au Chevalier, le font réputer son Favori, et qu'il est appelé son Collatéral, comme sorti de son côté.
Cette marque de faveur et de bienveillance est si ancienne, que Grégoire de Tours a écrit que nos Rois de la première race donnant le baudrier et la ceinture dorée baisaient les Chevaliers à la joue gauche, et proféraient ces paroles: Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, etc.
La coutume de faire des Chevaliers en les frappant doucement d'épée et de glaive avec des caresses, est décrite par Jean de Sarisbury in Policraetio, en parlant des anciens Normands.
Thomas Smith remarque pareillement comme le Prince faisait un Chevalier de l'Acollée, en le frappant doucement de son épée. Ce qui se pratiquait peut-être à l'exemple des esclaves, auxquels on donnait la liberté chez les Romains après que le Prêteur les avait frappés d'une baguette nommée Vindicta.
Ce fut de la sorte que Guillaume le Conquérant Roi d'Angleterre conféra la Chevalerie à Henry son fils âgé de dix-neuf ans, avec des armes, au récit de Guillaume de Malmesbury.
C'est pour cette raison que le Chevalier d'Acollade est aussi dit Chevalier d'armes, étant appelé Miles, parce qu'il entrait dans la profession de la guerre; l'épée, le haubert, le heaume et toutes les autres armes dont il était revêtu, en étant des symboles.
Le Collier a aussi été la marque la plus brillante de la Chevalerie, ainsi que les éperons dorés que le Chevalier portait, à la différence de l'Écuyer qui les avait de couleur blanche et argentée, selon un Registre du Duché de Guyenne de l'an 1273, qui est à la Chambre des Comptes.
Cela se justifie encore dans ce que rapporte le Moine de Marmoutier des cérémonies qui s'observèrent lorsque Geoffroy Duc de Normandie et Comte d'Anjou fut fait Chevalier, et il fut équipé de toute sorte d'armes.
La même chose est prouvée lorsque le Roi Charles V donna l'Ordre de Chevalerie à Louis II Roi de Sicile.
Je remarquerai à ce sujet, que Richard II Roi d'Angleterre fut arrêté par Henry Duc de Lanclastre son cousin pour le dépouiller de la Couronne; qu'on lui porta dans la prison des éperons noirs; et qu'en ayant demandé la raison, le valet lui répondit en ces termes: Très-cher Seigneur, c'est pour vous; et que le Roi lui répartit en ces termes: va dire à Henry de Lanclastre de par moi que je suis loyal Chevalier, et qui oncques n'ai forfait à la Chevalerie, et qu'il m'envoie éperons de Chevalier, ou autrement je ne changerai point. A donc le valet lui apporta des éperons dorés.
Les Chevaliers selon la coutume d'Angleterre rapportée par Édouard Bisse en ses notes sur Nicolas Upton, paraissent premièrement en état d'Écuyers dans les cérémonies; puis en état de Chevaliers, quand ils avaient reçut l'Ordre. En la première cérémonie, leurs couvertures et équipages n'étaient pas si riches, ni de si somptueuses et exquises fourrures (ce sont les termes) car il n'appartenait qu'aux Chevaliers d'user de vair et d'hermines; c'est ce que j'apprends du Comte d'Estienne de la Fontaine, argentier du Roi, de l'an 1351.
Les manteaux d'écarlate vermeille appelés Pallia militum, étaient réservés pour la Chevalerie, et il n'y avait que les Chevaliers qui pussent être habillés comme les Souverains, n'y qui pussent porter de l'or et des manteaux. Cela est contenu dans les Registres de la Chambre des Comptes.
Les mêmes Registres nous apprennent que les Écuyers ne portaient aucun ornement; néanmoins ils prirent enfin de l'argent sur les habits qu'on leur donnait aux fêtes de la Cour. Et ils avaient une longue tunique de couleur brune et modeste, lorsqu'ils se présentaient pour recevoir l'Ordre de Chevalerie. Ce fut de la sorte que Louis Roi de Sicile et Duc d'Anjou parut l'an 1389 devant le Roi Charles VI pour être fait Chevalier.
Les Rois d'armes et les Hérauts donnaient attestation de la réception en la Chevalerie, en voici deux certificats. Le premier, de Gabriel le Forestier Roi d'armes du titre de Normandie, porte que le Roi Charles VIII après la bataille de Fournoue en 1495 fit Chevalier de l'Acollade Guillaume de Coustances Archer de la Garde sous Claude de la Chastre Seigneur de Nancay. Le second certificat est de deux Rois d'armes de Normandie et de Bretagne, daté de l'an 1514 ou 1515 comme le Roi François 1er à son avènement à la Couronne, donna l'Accolade par un coup d'épée à Nicolas Roussel Seigneur de Godarville-en-Caux, présent le Cardinal d'Albret, et plusieurs autres.
En ces derniers temps, les Rois ont accordé des Lettres pour certifier leur grâce. André Favin en son théâtre d'honneur et de Chevalerie, parle d'un Chevalier de l'Accollade créé par le Roi Louis XIII auquel il en fut expédié à Paris en Avril 1618, signées de Lomenie, et sur le repli par le Roi Visa du Vair, et scellé de lacs de soie en cire verte.
Reste ici de savoir si la Chevalerie se peut conférer en tout lieu: c'est la maxime des Jurisconsultes, que la création des Chevaliers étant un acte légitime qui ne reçoit ni jour, ni condition, ni lieu distinct et séparé précisément, elle peut être reçue sine acceptatione loci.

Des Ordres d'Allemagne, et des États du Nord.

L'Institution de l'Ordre militaire de Frise qu'on dit être le plus ancien d'Allemagne, est attribué à l'Empereur et Roi Charlemagne en mémoire de ce qu'il avait défait Didier Roi des Lombards; il fut mis sous la règle de Saint-Basile; et la devise est une Couronne impériale d'or, qui sert aussi de titre à cet Ordre, dont plusieurs auteurs ont traité, et entre autres Joannes Becanus, Martinus Acon, Joannes Episcopus de Tracerta et Molanus. La date de l'Institution est incertaine.
Celle de l'Ordre de Jésus-Christ en Livonie, dit des Porteglaives, se trouve diversement: car les uns la mettent en 1186 et les autres en 1197. Volguinus et Meinrard Maîtres du même Ordre, le mirent sous la règle de Saint-Basile: la devise est une double épée rouge en forme de Croix en sautoir. Il a été en vigueur l'espace de 357 ans. L'Évêque Albert en fut l'Instituteur pour la défense de la Religion contre l'idolâtrie.
L'Empereur Sigismond de Luxembourg, qui régnait l'an 1410 pour terminer le Schisme de Hongrie, inventa l'Ordre du Dragon à l'honneur de Saint-Georges, et y mêla la fable de Bellerophon porté par le cheval Pégase, parce que cet Ordre était institué pour étouffer les guerres qui avaient travaillé l'Église. La marque est une Ceinture verte à laquelle pend un Dragon, et la Croix est aussi verte.
Il y a un autre Ordre de Hongrie, dit aussi de Saint-Georges, dont les Chevaliers portent une Croix rouge Patriarcale, c'est-à-dire à deux croisillons, une Couronne au pied; la devise, Draconis vici militia.
Il y a l'Ordre du Dragon renversé en Bohème, qu'on dit avoir été créé en 1318.
Un autre Ordre appelé de la Discipline, aussi établi en Bohème sous la règle de Saint-Basile. La devise est une Aigle blanche symbole de la foi, dit Mennenius.
Il y a en Pologne un Ordre de l'Aigle blanche, de Gnesne, qu'on dit avoir été érigé en 1321.
Jean Azore dit qu'en Saxe, il y avait un Ordre du Saint-Esprit.
Hieronymus Mesegerius dit que les Chevaliers de Tursino ont été institués par les Archiducs d'Autriche pour combattre les Turcs; ils sont sous la règle de Saint-Basile, et leur devise est une Croix verte.
L'Ordre de Saint-Georges en Carinthie et en Autriche, qui porte la Croix rouge tréflée, et une Couronne d'or sur le premier croisillon, fut institué par Maximilian 1er Empereur et Archiduc d'Autriche, pour s'employer à la guerre contre le Turc. Les Empereurs en sont protecteurs; les Chevaliers sont sous la règle de Saint-Augustin, et font voeu d'obéissance et de chasteté conjugale.
Olaüs Magnus dit que Magnus IV Roi de Suède, inventa en 1334 pour la défense de la Religion et du Royaume, l'Ordre appelé de la Foi, ou des Séraphins, qui a pour Collier une double chaîne d'or en forme de maille, composé de Chérubins d'or émaillés de rouge, avec des Croix Patriarcales d'or; et au bout du Collier, une ovale émaillée d'azur, avec un nom de Jésus d'or à quatre clous émaillés de blanc et de noir.
Les Chevaliers du Glaive en Suède, dont parle Mr Daviti, portent le Collier étoffé d'épées d'or.
L'Ordre de l'Éléphant a été institué par Christierne 1er Roi de Danemark en l'année 1478, selon André Favin; il a pour Collier une chaîne d'or enrichie de Croix ancrées, et d'Éléphants d'or émaillés de blanc, chacun chargé d'un château d'argent maçonné de sable, où pend une image de Notre-Dame tenant Notre-Seigneur entre ses bras, et une orle environnée de rayons d'or.
Frédéric II Roi de Danemark établit un nouvel Ordre de Chevalerie en 1670 appelé de Danebrovv, ou de la Fidélité, composé de 19 principaux Seigneurs et Officiers de ce Royaume qui doivent porter au col une croix blanche attachée à un ruban blanc et rouge, en mémoire de celle qu'on dit avoir miraculeusement apparu au Roi Valdemar II lorsqu'il faisait la guerre aux Payens dans la Livonie.
Le dernier des Ordres qui a été institué est celui de Jésus-Christ, et de la Passion, par le Prince Charles, neveu de l'Électeur de Saxe. La première assemblée en fut faite le 7 Février 1671. Les Chevaliers portent un ruban bleu tabisé, d'où pend une médaille d'or, où est empreinte l'image de Notre-Sauveur. Ils font profession d'honorer particulièrement le Vendredi, et autres jours de la semaine Sainte, et d'assister aux services qui se font ces jours-là.
Il y a l'Ordre de Luxembourg ou du Parc, ainsi appelé, parce qu'il est fermé de Bois dans la figure qui en est représentée; il dépendait des Comtes et Ducs de Luxembourg.
L'Ordre du Cygne érigé dans le pays de Belge par Salucius Bragen, avait pour devise un Cygne, Richard de Wascbourg en parle dans ses Antiquités Belgiques.
Il y avait à Clèves un Ordre appelé Stultorum, créé en faveur des Sages. Celui de l'Ourset, dit de Saint-Gal en Suisse, dépendait de l'Abbé Souverain de Saint-Gal.

Des Ordres d'Italie et du Levant.

Entre les plus anciens Ordres de Chevalerie institués en Italie est celui de Notre-Dame du Saint-Sépulcre, dit de Joie, ou des Joyeux, qui fut inventé par Barthélémy de Vincenza, ou Vicetinus, de l'Ordre des Prêcheurs, depuis Évêque de Vicenze; pour pacifier les villes d'Italie et défendre la Foi. Il fut confirmé l'an 1261. Les Chevaliers portent la Croix de pourpre à quatre étoiles d'or aux extrémités. Ils furent premièrement établis à Péruse, mais Innocent VIII les unit aux Chevaliers de Rhodes. Ils faisaient preuve de Noblesse paternelle et maternelle. Vocantur gaudentes, disent Joannes Villarius et Salimbenus.
On établit l'an 1246 à Bologne la Grasse et à Modene, l'Ordre de la Madonna, qui fut confirmé par le Pape Urbain IV. Les Chevaliers portent la Croix rouge frangée d'or, et ils s'appellent Fratres de Madonna, de la Sainte Mère de Notre-Seigneur.
Mennenius dit que l'Ordre militaire de Saint-Marc de la Calza à Venise a eu son commencement dès l'an 1352. Sa fin est de défendre la religion Chrétienne, et de combattre les Turcs. Il faut être Noble pour entrer dans cet Ordre, qui a pour devise un Lion couronné, tenant d'un de ses pieds un glaive, et de l'autre un Livre.
L'Ordre du Noeud à Naples fut établi sous le pape Clément VI. Les Chevaliers sont sous la règle de Saint-Basile: ils portent un noeud de pourpre entrelacé d'or, et une Couronne Royale, par Bulle du 26 mai 1351.
Un Registre de la Chambre des Comptes qui m'a été communiqué par Monsieur d'Herouval, contient que l'Ordre du Saint-Esprit fut créé à Naples au château de l'Oeuf pour 300 Chevaliers, par Louis d'Anjou Roi de Jérusalem et de Sicile, en l'honneur du Saint-Esprit. Ils portaient un noeud blanc, et dessus le noeud un rai, en mémoire du Saint-Esprit. Pour le deuil ils avaient un chaperon noir et un rai. Leur bannière devait être de toile d'argent. Ils étaient obligés de jeûner le jeudi. Les statuts portent que nul Chevalier n'entreprendra aucun long voyage sans le congé du Prince, et qu'on ne recevra aucun Écuyer Chevalier si ce n'est à la Fête de la Pentecôte: et chaque Chevalier était tenu de faire chanter sept messes pour le Chevalier trépassé. Le dernier chapitre se tint le dernier jour de l'an 1353.
Ferdinand Roi de Naples y érigea aussi l'an 1463 l'Ordre militaire de l'Hermine. Le Collier est d'or, d'où pend une hermine avec cette devise: Malomori quam foedari.
La Milice des Argonautes fut instituée par Charles III Roi de Naples Comte d'Anjou, pour la protection de la Religion Chrétienne: la devise est Non credo.
Il y a des Chevaliers de la Lionne à Naples.
Les Rois de Chypre de la Maison de Lusignan, ont fondé un Ordre militaire, dont la devise est une épée qui pend à un collier: cette épée embrassée de la lettre S, signifiant le mot Secretum. Il est sous la règle de Saint-Basile: Estienne de Lusignan, de l'Ordre de Saint-Dominique, en parle.
L'Ordre de l'Annonciade fut créé l'an 1362 par Amé VI dit le Verd, Comte de Savoie, selon Samuel Guichenon en son Histoire de Savoie. Le collier est composé de roses d'or émaillées de blanc et de rouge, et jointes ensemble par un lacs de soie, dans lesquelles étaient entrelacées quatre lettres F E R T, qui signifient au dire de cet Auteur, frappez, entrez, rompez tout, ou comme disent les autres, Fortitudo ejus Rhodum tenuit. Au bout du collier était une ovale émaillée de blanc et de rouge; et au dessus l'image du Chevalier Saint-Maurice Chef de la Légion de Thebes. Mais Amedée VI l'an 1434 y ajouta quinze roses blanches et rouges attachées à ces Cordelières et au lieu de l'image de Saint-Maurice, il y mit la figure de l'Annonciation du mystère de l'Incarnation faite à Notre-Dame par l'Ange Gabriel.
Emmanuel-Philebert Duc de Savoie établit à Ripaille l'Ordre de Saint-Maurice martyre, Patron des Allobroges l'an 1440 sous la règle de Saint-Augustin, comme assure Joseph Micheli. Le Pape Grégoire XII, déclara ce Duc et ses successeurs Maîtres de cet Ordre. Grégoire XIII le confirma l'an 1572. Il fut institué pour s'employer à la défense de la Religion Chrétienne. Les Chevaliers font voeu de chasteté conjugale, de pauvreté et d'obéissance. Ils ont deux Maisons principales dans les États de Savoie; l'une à Nice, et l'autre à Turin. La devise est une Croix blanche qui se termine en fleurons. Ils ne peuvent contracter qu'un seul mariage.
La Chevalerie de Saint-Georges à Gênes fur érigée par Frideric III Empereur. Les Ducs de la République de Gênes en sont les Maîtres et Supérieurs. Les Chevaliers combattent pour la Foi Catholique, et sont sous la règle de Saint-Augustin. Leur devise est une Croix rouge. Mennenius en fait mention.
L'Ordre de la Milice de Jésus-Christ a été établi pour empêcher que les Infidèles n'oppriment la Chrétienté. Les Chevaliers portent un Saint-Michel avec cette inscription Quis ut Deus? Les personnes mariées sont admises en cet Ordre. Il faut faire preuve d'être né en légitime mariage, et fournir quatre degrés de Noblesse paternelle et maternelle, avoir pour le moins 18 ans, et être sans dette, autrement on n'est par recevable.
Cosme de Medicy grand Duc de Toscane institua l'Ordre de Saint-Étienne Pape et Martyr Patron des Florentins, sous la règle de Saint-Benoît. Il fut confirmé par le pape Pie IV l'an 1561. Les statuts portent qu'il faut être personne Noble, et combattre sur la Mer les Turcs et les Mores. Les chevaliers se peuvent marier, mais ils font voeu de chasteté conjugale, d'obéissance et de charité envers le prochain. La Marque de cette Chevalerie est une Croix rouge échancrée, cordée et frangée d'or. Il y a des Prêtres et des Servants, selon Carolus de Tapia, et Gualterius en ses Tables du seizième siècle.
L'Ordre de la Rédemption de Jésus-Christ, ou du Tabernacle, a été établi à Mantoue par Vincent de Gonzague IV Duc de Mantoue et de Montferrat, aux noces de François son fils l'an 1608 pour vingt Chevaliers. L'Ordre fut approuvé par Paul V, Saint Longin Centurion Martyr en est le Patron, selon Joseph Micheli. Cet Ordre est en l'honneur des trois gouttes de sang de Jésus-Christ, qui sont représentées avec l'Eucharistie pour marquer cet Institut.
Charles de Gonzague de Clèves, Duc de Nevers, depuis Duc de Mantoue et le Comte d'Althaan, et Jean-Baptiste Petrinquan Sforce rétablirent l'Ordre de la milice Chrétienne de Notre-Seigneur l'an 1619 sous la protection de Notre-Dame, de Saint-Michel, et de Saint-François. Cet Ordre est fondé sur l'amour de Dieu et du prochain pour la défense de la Foi Chrétienne. Il y a en cet Ordre des Chevaliers Gentilshommes, Laïques, et Prêtres ou Bénéficiers, et dix Frères Servants. Le Pape Paul V l'approuva, et s'en fit le Chef et le protecteur. Les Chevaliers portent une Croix d'or émaillée de bleu, et font preuve de Noblesse, tant paternelle que maternelle, de quatre degrés. Mennenius, et Philippes Moreau en parlent.
Il y a un Ordre de Saint-Jacques de Luques.
L'Ordre de Saint-Jean et de Saint-Thomas d'Ancone est maintenant agrégé à celui de Saint-Jean de Malte. Il a été approuvé par le Pape Alexandre IV, sous la règle de Saint-Augustin. Les Chevaliers portent la Croix rouge, et au milieu est l'effigie de Saint-Thomas.
Le Pape Jean XXII créa l'Ordre de Christ, et Paul V le confirma. François Tarase et Jean Confettius lui attribue la Croix rouge bordée d'or.
Bernadus Lucebergius écrit que l'Ordre de Saint-Georges fut établi par le Pape Alexandre VI et par l'Empereur Maximilian 1er pour combattre les Turcs. Les Chevaliers portent une Croix d'or avec une couronne d'or en cercle. Les Génois l'ont pris pour leur tutélaire.
Le pape Léon X institua l'Ordre de Saint-Pierre et Saint-Paul l'an 1520 comme écrivent Alfonse Ciaconius et Daviti. Les Chevaliers portent l'image des Apôtres et l'Ordre de Saint-Pierre, qui est particulier, une clef d'argent.
La marque de l'Ordre de Latran est une Croix d'or patée, émaillée de rouge.
Le Pape Paul III érigea l'Ordre de Chevalerie de Saint-Georges pour résider à Ravenne. Les Chevaliers portaient une Croix d'or pour leur devise. Cet Ordre est éteint.
L'Ordre de l'Éperon fut établi par le Pape Pie IV l'an 1560. Les Chevaliers portent une Croix tissée de filets d'or. Perrus Belcius en parle, ainsi que Pierre de Belloy. Le Pape Innocent XI le conféra à Rome le 3 Mai 1677 à l'Ambassadeur de Venise près de sa Sainteté.
Alfonse Ciaconius Dominicain en son Histoire des Papes et des Cardinaux et René Chopin, disent que le Pape Sixte V à introduit l'Ordre de Notre-Dame de Lorette. Les Bulles sont du 5 Juillet l'an 1586. Les Chevaliers portent l'image de Notre-Dame comme elle est représentée à Lorette.
Le Pape Urbain VIII érigea l'Ordre militaire de la Conception Notre-Dame sous la règle de Saint-François, et sous la protection de Saint-Michel et de Saint-Basile, suivant le témoignage de Bernardus Luceburgius.
Il y a eu plusieurs Ordres militaires au Levant. Celui du Mont Sinaï ou de Saint-Catherine en Grèce a été établi par quelques Gentilshommes l'an 1063 sous la règle de Saint-Basile, pour garder le Sépulcre de Sainte-Catherine au Mont Sinaï, et pour favoriser les Pèlerins. Les Chevaliers portent une roue rouge clouée de blanc et percée d'une épée. Joseph Micheli en fait mention.
L'Ordre du Tombeau de Notre-Seigneur est décrit en vieux vers qui exposent l'Histoire de l'Évangile, et qui parlent des Soldats qui gardaient le Sépulcre.
Andréas Mendo en son livre de Ordine militari, parle de l'Ordre de la Lune Byzantine ou de Constantin en Grèce, sous l'invocation de Saint-Georges. La devise est un Labarum et un Croissant ou Lune demi pleine, qui est pendante au collier: au milieu de la Croix florencée est l'image de Saint-Georges à cheval. On appelle ces Chevaliers Angelicales.
Il y avait en la Palestine l'Ordre de Saint-Blaise, dit de Notre-Dame, fondé sous la règle de Saint-Basile. La devise est une Croix rouge; et au milieu, l'effigie de Saint-Blaise, Joseph Micheli en a parlé.
L'Ordre du Saint-Sépulcre de Jérusalem a pris son commencement l'an 1110 du temps de Baudouin 1er Roi de Jérusalem. Les premiers de cet institut prirent la règle de Saint-Basile le Grand, et maintenant ils sont sous celle de Saint-François. Les Chevaliers portent une Croix rouge potencée, accompagnée de quatre croisettes de même couleur. Ils font serment d'être Nobles d'extraction et de vacation, et d'avoir des biens suffisants pour vivre sans faire de gain mercenaire, et d'aller en armes en la Terre Sainte, ou de soudoyer un homme pour y aller, si les Princes Chrétiens faisaient une Armée.
Le Pape Alexandre III institua et confirma l'Ordre de Montjoie en Jérusalem l'an 1180 sous la règle de Saint-Basile. Les Chevaliers portent une Croix rouge. Ils sont dédiés pour combattre les Infidèles. Le Roi Alfonse le Sage les introduisit en Espagne pour aller contre les Mores, il les dota et les appela les Chevaliers de Mofrac. Du temps du Roi Ferdinand ils furent unis aux Chevaliers de Calatrava.

De l'Ordre des Chevaliers Hospitaliers du Saint-Esprit de Jérusalem, dit de Montpellier et de Sainte-Marthe.

Le droit d'Hospitalité est si ancien et si agréable à Dieu, que les Patriarches Abraham, Loth, et Tobie l'ayant eu en singulière recommandation, ils méritèrent de loger les Anges chez eux; et dans la naissance de la religion Chrétienne, la famille du Lazare et des deux Maries, Magdeleine et Marthe eurent l'honneur d'exercer la même Hospitalité envers Notre-Seigneur; mais l'une de ces deux soeurs Magdeleine s'appliqua particulièrement à la contemplation des choses Divines, et Marthe s'adonna à l'économie et à l'Hospitalité, ce qui donna lieu aux Chevaliers Hospitaliers de Jérusalem, dont je parle en ce Chapitre, de prendre cette Sainte pour Patronne et protectrice, sous le titre du Saint-Esprit, dont les grâces furent distribuées aux Apôtres assemblés en Jérusalem.
La persécution exercée au Levant par les Infidèles, contre les défendeurs de la Foi, et les charitables Chrétiens, leur fit quitter le séjour de Jérusalem pour s'établir en France, où ils furent favorablement reçus (selon les titres de cet Ordre) en la Province de Languedoc, dans le diocèse de Magalonne, par le Seigneur de Montpellier, qui leur fit bâtir un Hôpital, auquel le Généralat de l'Ordre appelé du Saint-Esprit fut uni.
Le premier Chapitre général fut tenu à Montpellier l'an 1032, où se trouvèrent des Commandeurs de toutes les parties de la France, d'Allemagne, de Pologne, d'espagne, d'Angleterre, et autres lieux.
Jacques Roi d'Aragon Seigneur de Montpellier, s'étant servi de ces Chevaliers pour reconquérir la Murcie, leur fit bâtir plusieurs Maisons dans ses États en 1265 comme rapporte Jean Mariana dans son Histoire d'Espagne: et Eudes Duc de Bourgogne, qui avait beaucoup de zèle pour ces Hospitaliers fit en leur faveur plusieurs fondations.
Il est fait mention dans leurs Archives de quatre Hôpitaux de cet Ordre fondés dans les villes de Dijon, Besançon, de Tonnerre, et de Constances.
L'emploi de ces Chevaliers était d'entretenir les enfants exposés et orphelins de l'un et de l'autre sexe, les estropiés et invalides, les insensés et troublés d'esprit; d'assister les pauvres vieillards, les familles tombées en nécessité par quelque accident de la vie, qu'on appelle pauvres honteux, les malades de peste, c'est pourquoi ils faisaient un voeu de Martyre. Ils logeaient aussi les pèlerins, leur tenaient les passages libres, et sur mer et sur terre, lorsqu'ils allaient aux lieux Saints, rachetaient les Esclaves détenus chez les Infidèles, dotaient les pauvres filles, enseignaient les Arts libéraux et mécaniques aux orphelins, lorsqu'ils y étaient propres, afin qu'ils ne fussent point à charge à personne, et qu'ils pussent servir le public; enfin ils exerçaient, disent leurs statuts, tous les actes de miséricorde et de charité, méprisant leur propre vie pour le salut de leur prochain.
Les Papes ont eu cet Ordre en si particulière recommandation, qu'ils lui ont donné une infinité de grâces et de privilèges: spécialement ils ont permis à tous Religieux et Religieuses d'autres instituts qui se retirent chez eux, de commuer leurs voeux.
Il fut confirmé par deux Bulles du pape Innocent III des années 1198 et 1204 par une d'Honoré III de l'an 1217 et par une autre de Grégoire XI de l'an 1372 qui reconnut la maison de cet Ordre fondée à Montpellier pour Général et pour Chef, en faisant profession de la règle de Saint-Augustin.
En ces derniers temps l'an 1625 le Pape Urbain VIII favorisa de la Bulle les Chanoines Réguliers, les Clercs, les Laïcs, les Officiers, et tous ceux de l'un et de l'autre sexe qui font profession de cette Règle de l'Ordre du Saint-Esprit.
Il y a des Lettres patentes des Rois Henry II de 1553, Charles IX de 1562, Henry IV de 1608 et 1609, Louis XIII de 1610, 1612 et 1618 et du Roi Louis le Grand, données à Paris le 9 Septembre 1647 et à Dunkerque en 1671 enregistrées au Grand Conseil à Paris, le 18 Juin de la même année, pour la direction des Hôpitaux, Maladreries et lieux pieux de cet Ordre et Milice du Saint-Esprit.
La marque de cette institution est une double Croix blanche échancrée et Patriarcale. Outre le voeu que font ces Chevaliers, de résister aux Infidèles et de servir les malades dans les Hôpitaux, ils font preuve de vertu et de Noblesse de quatre lignes.

De l'Ordre des Chevaliers et Hospitaliers de Saint-Lazare de Jérusalem.

L'Ordre de Saint-Lazare prend son nom du Lazare qui fut ressuscité par Notre-Seigneur, comme il se voit dans l'Évangile de Saint-Jean. Et les Lépreux ou Ladres l'ayant pris pour Patron, l'on a communément appliqué aux Hospitaliers de cet Ordre, le titre de Maladrerie, Léproserie, Ladrerie, Lazaret, ou Maison de Saint-Lazare.
Ceux qui étaient infectés de cette maladie contagieuse étaient séparés des autres personnes, selon la Loi de Dieu. Et ils devaient demeurer hors les villes, suivant la Loi établie en Samarie, rapportée par Joseph en ses Antiquités Judaïques.
Les Lépreux étaient tenus par les Règlements de ce Royaume, de prendre la qualité de Ladres dans les Actes publics qu'ils passaient, et il leur était défendu d'aspirer à aucune charge publique, dont ils devaient se démettre en cas qu'ils en fussent pourvus. Il y en a un exemple dans un Arrêt de l'Échiquier de Normandie, pour un Sergent du ressort du Pont-Audemer. Et l'article 274 de la Coutume de cette Province contient que celui qui est jugé devoir être séparé pour maladie de Lèpre, retient l'héritage auquel il succède seulement par usufruit sans le pouvoir aliéner.
Les auteurs qui ont écrit de l'ancienneté de cet Ordre, en établissent le dessein et le fondement dès le premier Concile célébré à Jérusalem par les Apôtres avant leur séparation l'an 34 de la Naissance de Jésus-Christ; où après qu'ils eurent ouï les plaintes qui étaient faites sur l'administration des annonces, et qu'ils eurent considéré que la prédication de la parole de Dieu ne leur permettait pas de vaquer aux ministères extérieurs, et au secours que la miséricorde doit au prochain, ils jugèrent à propos de s'en décharger, comme il est porté dans les Actes des Apôtres. Et pour cet effet, ils élurent en même temps indifféremment du nombre des Juifs et des Gentils, des personnes illustres en vertu, comme Saint-Étienne, Philippe, Procore, Nicanor, Timon, Parmenas, et Nicolas d'Antioche, auxquels ils confièrent la recette et la disposition des charités publiques, et généralement tous les exercices des oeuvres de miséricorde. Tellement qu'on peut compter ceux-ci pour les premiers Hospitaliers de la Religion, qui a depuis porté le nom de Saint-Lazare.
Sans remonter dans les siècles si éloignés, on peut dire que l'établissement de l'Hospitalité et des lieux pitoyables de cet Ordre, a commencé par les soins de Gérard de Thon Provençal, natif de l'Ile de Martigues, qui a été le premier Grand Maître et Commandeur qui favorisa la prise de Jérusalem conduit par la valeur de Godefroy de Bouillon le Vendredi 15 Juillet de l'année 1099.
De Grec cet Ordre se rendit Latin, changeant la règle de Saint-Basile en celle de Saint-Augustin: ce qui fut fait avec l'aveu des Papes Gelase II et Calixte II. Et depuis il fut approuvé par Grégoire IX comme il se voit par leurs Bulles.
Raimond du Puy étant élu Supérieur de cet Ordre, il composa de nouvelles constitutions, qu'il fit approuver l'an 1123 à Calixte II ajoutant à son institut la profession des trois voeux de Religion.
Pendant que ces Chevaliers vivaient dans la Terre Sainte, exerçant avec zèle la fonction de leur Ordre, la nouvelle vint en France d'une irruption que les Egyptiens et les Arabes avaient faite dans la Galilée et dans la Syrie. Cette triste nouvelle émeut le zèle et le courage du Roi Louis VIII dit le Jeune, et le porta à solliciter le Pape Eugène III qui avait été Moine de Cisteaux d'assembler un Concile, et de pourvoir de remède aux violences qu'exerçaient les Infidèles contre les Chrétiens. Ce Concile fut tenu à Vézelay l'an 1145 le Pape et le Roi y assistèrent en personne, Saint-Bernard Abbé de Clervaux y harangua avec véhémence, et d'un commun avis des Prélats et des Princes, on conclut une expédition en la Terre Sainte. Le Roi Louis y alla, et l'an 1148 amena ces Chevaliers Hospitaliers en son Royaume, et leur donna l'an 1150 une Église dans Paris.
Les voyants résolus de faire un Corps de leur Compagnie en France, sans préjudice néanmoins de l'obéissance qu'ils devaient à leur Grand Maître, qui était demeuré dans la Terre Sainte en la ville d'Acre, alors Siège principal de leur Religion; il leur donna son château de Boigny situé près d'Orléans, pour y établir leur Chef et Supérieur deça les mers. François le Maire dans ses Antiquités de la ville d'Orléans, et René Chopin en son livre de Sacra Politia, font mention de cette demeure de Boigny ou Bony. Les Lettres de cette donation paraissent encore aujourd'hui datées de l'an 1154 et signées de plusieurs grands Officiers.
Enfin cet Ordre se trouvant en un déplorable état dans le Levant, il perdit par l'invasion du Turc l'Hôpital de Constantinople, et celui de Saint-Samson qu'ils avaient à Corinthe dans la Morée.
Cet Ordre ne subsiste donc plus que dans l'Europe, et la France a maintenant son Siège principal.
Les Papes notamment Jean XXII, Grégoire X, Paul II et Urbain VI l'affermirent, et le favorisèrent de plusieurs grâces et privilèges. La forme du gouvernement de cet Ordre fut observée jusqu'à la fin du 15 siècle, dans lequel la rigueur des Constitutions fut relâchée par le malheur du temps, et par l'instabilité de toutes les choses humaines que ne sauraient longtemps subsister dans la perfection: les Frères de cet Ordre prenant la liberté de se marier, se prévalurent de la négligence que l'on apportait à maintenir les biens vacants de l'Ordre, et à y pourvoir des Sujets capables, ce qui leur donna lieu de transférer dans leurs Maisons profanes celles de la Religion, et de se les rendre héréditaires.
Il semblait alors, que cet Ordre fut mis en proie au premier occupant: la Bulle du Pape Innocent VIII de l'an 1489 le fait assez connaître; car il le supprima pour l'unir avec ses biens et privilèges, à celui de Saint-Jean de Jérusalem. Ce qui fut confirmé par autre Bulle de Jules II de l'an 1505.
L'Empereur Charles-Quint obtint du Pape Léon X le rétablissement de cet Ordre dans les Royaumes de Sicile et de Naples, et notamment la réunion des Hôpitaux de Capoue, et Messine et de Panorme, nonobstant l'extinction faite par Innocent VIII.
Philippes II Roi d'Espagne, eut recours au Bien Heureux Pie IV pour obtenir la Bulle qui commence inter assiduas, en date de 1565 par laquelle il rétablit absolument l'Ordre de Saint-Lazare; nonobstant la réunion de toutes les Commanderies, Hôpitaux et Chapelles qui se trouveraient dans les États; sous un Chef qu'il fit nommer à sa dévotion, savoir Jeannot de Castillon Milanais son Sujet.
Le même Roi Philippes se prévalant de l'inclination que le Pape Pie IV lui témoignait à cause de la victoire de Lepante remportée par Jean d'Autriche son frère naturel, impetra de lui en faveur de Jeannot de Castillon, une très ample Bulle l'an 1572 qui commence Injunctum nobis.
Jeannot de Castillon étant décédé à Verceil ville de Piémont, où Emanuel Philebert Duc de Savoie l'avait gracieusement attiré, il obtint l'an 1572 la grande Maîtrise du Pape Grégoire XIII auquel il exposa que l'Ordre de Saint-Lazare était presque éteint et ruiné, qu'il était sans Chef et sans appui, et que si sa Sainteté lui voulait accorder l'union de cet Ordre et de ses biens à celui de Saint-Maurice, dont il avait obtenu l'institution un mois auparavant du même Pape: et outre, s'il lui plaisait de lui en attribuer la qualité de Grand Maître et à ses successeurs Ducs de Savoie, il s'obligerait d'entretenir deux Galères au Port de Villefranche de Nice contre les Infidèles et les Pirates, à la disposition du Saint Siège; et promit aussi d'établir, comme il fit, deux demeures pour ces Chevaliers à Nice et à Turin.
Le Pape attiré par ces offres, lui fit expédier une Bulle au mois de Novembre l'an 1572 qui commence pro commissa; par laquelle il lui accorda ses demandes, à l'exception toutefois des biens de Saint-Lazare qui se trouveraient dans les États du Roi Catholique.
Le Duc de Savoie ayant obtenu ce qu'il désirait du Saint Siège, prit possession sans difficulté des Commanderies de Saint-Lazare, qui étaient en sa puissance, et les unit à l'Ordre de Saint-Maurice nouvellement institué par la Bulle du même Grégoire qui commence, Christiani populi corpus, en date du mois d'octobre 1572, s'attribuant le titre de Grand Maître des Ordres de Saint-Maurice de la légion de Thèbes, et de Saint-Lazare de Jérusalem: mais il n'a jamais été reconnu par la France, ni hors de ses États, pour Chef de l'Ordre de Saint-Lazare.
Charles Emanuel Duc de Savoie, fils et successeur de Philebert Emanuel suivant le dessein de son père, obtint une autre Bulle du Pape Clément VIII qui commence Romanum Pontificem, donnée à Rome le 9 Septembre 1603 laquelle confirme tous les privilèges de l'Ordre de Saint-Lazare avec les Bulles de Pie IV et de Grégoire XIII.
Pour découvrir évidemment la nullité de ces procédures, il importe d'observer que toutes les Bulles émanées au préjudice de cet Ordre, tendances à sa suppression, ou à son union avec ceux de Saint-Jean et de Saint-Maurice, ont été accordées in forma gratiosa, et sans ouïr les personnes intéressées. Ce qui répugne aux Constitutions Canoniques, et aux Décrets des Conciles, spécialement de ceux de Constance et de Trente, qui déclarent toutes celles de cette nature subreptices, et qui défendent toutes annexes et unions de bénéfices sans contestation de cause.
Dès l'année 1547, la France commença à découvrir clairement les usurpations qu'on faisait sur l'Ordre de Saint-Lazare, sous prétexte des Bulles d'Innocent et de Jules: le Grand Maître Claude de Mareuil et les Chevaliers de cet Ordre en firent plainte au Roi Henry II et se pourvurent en la Cour de Parlement contre l'extinction de cet Ordre, et son union à celui de Saint-Jean, dont s'ensuivit un Arrêt rendu le premier Mars, qui déclara abusives l'extinction et l'union, et par conséquent les Bulles inutiles et sans effet, pour n'avoir point été exécutées selon la forme des Décrets du Concile de Constance.
On n'ignore pas que les Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem n'aient obtenu dans Lyon des Lettres patentes du Roi Henry III de l'an 1574 qui était le premier de son règne, confirmatives de la réunion qui s'était faite avec leur Ordre de quelques Commanderies de celui de Saint-Lazare, dont ils jouissaient en vertu des Bulles d'Innocent VIII et de Jules II. Mais depuis, ce Prince révoqua ces Lettres, et nomma Aimar de Chattes Grand Maître de cet Ordre, et le maintint en la Commanderie de Bony contre celui de Malte, qui en avait pourvu un de ses Chevaliers l'an 1586 comme l'a remarqué René Chopin.
Philebert de Nerestang fut appelé par le Roi Henry IV l'an 1606 à la charge de Grand Maître de l'Ordre de Saint-Lazare, et Sa Majesté l'envoya au Pape Paul V pour traiter avec lui du rétablissement et de la conservation de cet Ordre dont il se protestait restaurateur. Le Pape trouva bon pareillement d'ériger à l'instance du Roi l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel, ce qu'il fit par sa Bulle qui commence Romanus Pontifex, en date des Calendes de Mars l'an 1607 et fit union du même Ordre à celui de Saint-Lazare; Ensuite de quoi, le Roi donna au même sieur de Nerestang, les provisions de la Charge de Grand Maître des deux Ordres, en date du mois d'Avril 1608.
Enfin le Roi Louis le Grand, par ses Édits du mois d'Avril 1664 et du mois de Décembre 1672 vérifiés au Grand Conseil le 20 Février 1673 unit pareillement à la Communauté de ces deux Ordres de Saint-Lazare de Jérusalem et de Notre-Dame du Mont-Carmel, les Ordres Hospitaliers du Saint-Esprit de Montpellier, de Saint-Jacques de l'Épée, de Saint-Jacques de Lucques, du Saint-Sépulcre, de Sainte-Christine de Somport, de Notre-Dame Teutonique, de Saint-Louis de Bouchereaumont, et autres.
Ces Édits et les Arrêts rendus en conséquence, ont été confirmés par la Bulle de Mr. le Cardinal de Vendosme Legat à latere en France, du Pape Clément IX en date du mois de Juin 1668.
Les Chevaliers de cet Ordre de Saint-Lazare à la différence des Clers peuvent maintenant se marier en observant la chasteté conjugale. Ils font preuves de Noblesse de quatre Races paternelles et maternelles, et portent la Croix d'or à huit pointes pommetées. Le ruban est de soie violette ou amarante.

De l'Ordre des Chevaliers Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem.

La religion de Saint-Jean de Jérusalem a pour Fondateur Gérard, de la Province de Toulouse, en 1099. Le Pape Caliste II, la confirma en 1120 et Honoré III en 1125. Barbosa fait mention de ces Hospitaliers, qui s'érigèrent en forme de milice pour assurer les chemins, et pour garder le Saint-Sépulcre: mais Saladin Prince des Sarrazins en Egypte, s'étant emparé de Jérusalem en 1187, ils furent contrains de se réfugier à Marget en Phénicie, où ayant demeuré quatre ans, ils se retirèrent en 1191 à Ptolemaïde, ou Acre en Syrie, conquise par Philippe-Auguste, et lui donnèrent le nom de Saint-Jean d'Acre. Leur nombre s'étant accru, ils se mirent sous la règle de Saint-Augustin; et outre le soin qu'ils prenaient des malades, ils faisaient aussi la guerre aux Infidèles, sur lesquels ils remportèrent plusieurs victoires. S'étant établis en Espagne, ils y combattirent les Mores. En 1291 ayant été forcés de céder la ville d'Acre aux Sarrazins, et de quitter la Palestine, ils firent leur retraite en l'Ile de Chypre, d'où en 1208 ils passèrent en Ile de Rhodes qu'ils prirent étant aidés des Chrétiens occidentaux, en ayant chassé les Turcs qui la possédaient sous Ottoman leur Empereur. Ils demeurèrent à Rhodes 214 ans, et furent appelés Chevaliers Rhodiens. Les Turcs sous Soliman, reprirent Rhodes le 25 Décembre 1522 après un long siège, mais ces Chevaliers en sortirent avec des conditions honorables. Enfin, l'Empereur Charles-Quint leur donna l'Ile de Malte en 1529 à la charge de l'hommage et reconnaissance d'un oiseau de proie tous les ans, comme Roi de Sicile.
Cet Ordre comprend trois Etats, celui des Chevaliers, celui des Servants d'armes, et celui des Chapelains, suivant la division faite en 1230. Les Chevaliers sont Nobles de quatre races, du côté paternel et maternel, et portent les armes. Les Servants d'armes sont de bonne famille, et souvent Nobles et Gentilshommes: mais n'ayant pas la noblesse de quatre races, ils sont dans ce second rang; Les Chapelains ou Prêtres Conventuels, sont Nobles ou de famille considérable, et sont destinés à l'Eglise.
Il est divisé en huit Langues ou nations, qui sont Provence, Auvergne, France, Italie, Aragon, Allemagne, Castille, et Angleterre. Ces Langues ont chacune leur Chef, appelé Bailly Conventuel. Il y a aussi plusieurs grands Prieurés, et des Baillifs Capitulaires: comme en la Langue de France, le Chef ou Bailli Conventuel, est l'Hospitalier de Malte: les Grands Prieurés sont France, Aquitaine, et Champagne: les Baillifs Capitulaires, sont le Bailly de la Morée, et le Grand Trésorier. Dans chaque prieuré il y a plusieurs Commanderies, dont les unes sont destinées aux Chevaliers, et les autres aux Servants d'armes et Chapelains.
Les Chevaliers portent la Croix échancrée à huit pointes, émaillée de blanc: les Servants d'armes la portent aussi avec permission du Grand Maître. Les Chapelains la portent ordinairement de toile blanche cousue sur leur manteau. Dans leurs armes, les Chevaliers, et les autres aussi, ajoutent en chef, une Croix d'argent, en champ de gueules.
Ceux que l'on appelle Grands-Croix, sont les Baillifs Conventuels, les Grands Prieurs, et les Baillifs Capitulaires. Il y a aussi des Grands-Croix honoraires, comme les ambassadeurs de l'Ordre.
Les preuves de Noblesse que font les Chevaliers, ne sont pas uniformes, et les coutumes sont différentes selon les Langues et les Prieurés. En France ils les font de huit quartiers, qui aillent au-delà de cent ans, sinon il faut remonter jusqu'aux Trisaïeuls et Quartaïeuls. Les Statuts veulent qu'ils soient Gentilshommes de nom et d'armes, non descendus d'infidèles ni de gens trafiquants, et ils excluent tous ceux qui sont nés hors légitime mariage, excepté les enfants naturels des Rois et des Princes souverains.
En Italie et en Espagne, ils demandent quatre lignes paternelles et maternelles; en Allemagne seize quartiers.
La Bulle du Pape Paul V dit qu'en la promotion des Grands-Croix, on doit considérer plutôt le mérite que l'ancienneté, mais cela ne s'observe pas, et les Chevaliers y sont élevés selon le rang que leur donne l'ancienneté de leur réception. Ceux qui aspirent aux Commanderies, doivent avoir fait leurs caravanes sur mer contre les Turcs, si ce n'est qu'ils demeurassent actuellement auprès du Grand Maître, et qu'il les en dispensât. Non seulement les Chapelains, mais aussi les Chevaliers font voeu de Chasteté, d'obéissance et d'Abdication de propres. Ils ne peuvent faire testament: et leurs biens appartiennent à la Religion. Le Grand Maître a la collation des bénéfices, et a la Juridiction spirituelle et temporelle sur tout l'Ordre, comme il s'apprend de la Bulle de Pie IV; Ils sont exemps du paiement des dîmes, et de la taxe du Ban et Arrière-Ban en France à cause de leurs fiefs. Ils peuvent visiter les Paroisses de l'Ordre, comme l'ordonne la Bulle de Paul V qui commence Exposcit; et les Curés qui en dépendent, doivent porter la Croix sur leurs habits. Ils ont reçu de grands privilèges de Richard Coeur-de-Lion Roi d'Angleterre en 1194 de Louis VIII et de Saint Louis Roi de France, père et fils, en 1225 et 1226 de Philippes le Bel en 1304 et de François 1er en 1523 et 1526.

De l'Ordre des Chevaliers Hospitaliers de Notre-Dame du Temple.

Les Templiers prirent ce nom à cause de leur établissement qui se fit proche du Temple de Jérusalem l'an 1118 du temps du Roi Baudoin. Leur emploi était de défendre les pèlerins, et de rendre les chemins sûrs contre les courses des Infidèles. Quelques-uns uns veulent que les premiers fondements de l'Ordre des Templiers furent jetés l'an 1096 par Hugues de Payens, et par Godefroy de Saint-Omer du pays d'Artois, qui reçurent du pape Honoré III et d'Estienne Patriarche de Jérusalem, leur règle et leur habit qui était de couleur blanche avec une Croix rouge, pour signifier l'innocence et le martyre, comme dit Aubert le Mire. Leur titre était de Notre-Dame.
Ils avaient trois Ordres parmi eux, les Grands-Croix, les simples Chevaliers, et les Servants qui portaient une demi-Croix. Cet Ordre fleurit plus de 200 ans: il avait deux millions de revenus, et l'on y comptait 40000 Commanderies. Le Pape Clément V le supprima au Concile de Vienne l'an 1312. Plusieurs Chevaliers furent condamnés à la mort, et les autres dépouillés de leur habit. On leur attribuait plusieurs crimes contre la Foi, la Religion, la Chasteté et les bonnes Moeurs. Ils furent traités plus doucement en Espagne, qu'aux autres lieux de la Chrétienté; car au Concile Provincial célébré à Salamanque, ils furent déclarés innocents et exempts des crimes qu'on leur imposait; Leurs biens furent distribués à plusieurs autres Ordres militaires et Hospitaliers, comme à celui de Saint-Jean, et autres en France, en Espagne et ailleurs.
Crinitus, Pierre Grégoire, Jean Azorius et plusieurs autres, disent qu'ils étaient atteints et convaincus de crimes énormes, et que ce fut le sujet de leur suppression.
Robert Gaguin en a écrit en des termes abominables.
Guillaume de Tyr, Onufrius Panuinus, Platine, Joannes Azor, Vitriacus, Laurentius Maheu, Polydore Vergile, et récemment Mrs du Puy, ont fait des Traités des Templiers, qui représentent leurs crimes et leurs erreurs.
Villaneus, et Saint-Antonin veulent qu'ils fussent accusés par calomnie, en parlant du supplice de Jacques de Molan Bourguignon, Maître Général de leur Ordre, qui soutînt toujours que cet Ordre était saint, juste et orthodoxe.

De l'Ordre militaire et Hospitalier des Teutons de Notre-Dame de Jérusalem.

L'Ordre Teutonique qui porte la Croix noire, prit son origine l'an 1109, sous le titre de Notre-Dame, selon Vitriacus en son Histoire Orientale chap. 66. Et Henry Walpot qui en était chef, le fit confirmer par le Pape Célestin III l'an 1191.
Joseph Michelin qui est d'un autre avis, rapporte que cet Ordre fut plutôt institué par l'Empereur Fridéric 1er lorsqu'il envoya des troupes auxiliaires contre les Infidèles en la ville de Jérusalem; et qu'en l'an 1184, fit bâtir une Eglise sous l'invocation de Notre-Dame, en faveur de la nation Teutonique et Allemande.
Barbosa, dit que cette fondation fut faite dès l'année 1115.
Siffrieus, Raphaël Volaterranus, Trithemius, veulent que ce soit en l'année 1192. Christoforus Broundus et Jacobus Masenius, favorisent cette opinion.
Après la prise de Jérusalem par Saladin Prince des Sarrazins, les Chevaliers de cet Ordre transportèrent leur Hôpital à Acon ou Ptolémaïde; et enfin étant chassés de la Syrie avec les autres Chrétiens, ils s'habitèrent dans l'Occident en Prusse l'an 1226, comme dit Martin Cromerus dans son Histoire de Pologne. Y ayant été appelés par Conrard Duc de Moscovie pour combattre les Prussiens, il leur donna tout ce qu'ils pourraient conquérir en Prusse sous Herman Aza Saltzam leur Chef. Ils combattirent aussi les Lithuaniens et les Tartares qui demeuraient par delà la Vistule, et s'emparèrent de la Livonie et de la Curlande, Sébastien Munster, Tilemanus, Brendobacius, Tyrius, Tortellus, Ernius, Eulpot, Perrus Azor, Aldana, Mennenius, Paulus Morigia, Cathaneus et autres font mention de toutes ces conquêtes.
Cet Ordre a été florissant jusqu'au Grand Maître Alberg de Brandebourg et autres Chevaliers, qui cessant de garder leur Règle, et d'observer le Célibat, se marièrent, embrassant l'opinion de Luther l'an 1525. Ce changement donna prétexte au Roi de Pologne, de leur faire la guerre: ils furent trop faibles pour la soutenir; et après plusieurs combats et plusieurs sièges de villes, ils firent des Traités de Paix qui leur furent néanmoins avantageux: car ce fut à condition que les Grands Maîtres demeureraient Ducs de Prusse et de Livonie, en hommage de la Couronne de Pologne; et en cas qu'ils mourussent sans enfants légitimes, il y aurait reversion.
Les Ducs de Livonie, depuis cet accord, sont morts sans enfants, ainsi ce Duché est venu à la Pologne, et depuis par conquête au Roi de Suède.
Celui de Prusse a été divisé; car le dernier Duc Bogislas eut deux filles; l'Aînée mariée au Duc de Poméranie, l'autre à l'Electeur de Brandebourg: et le partage de ce Duché fut fait de la sorte, que la Prusse qui confine la Poméranie demeurerait au mari de l'Aînée, et l'autre partie au mari de la puînée.
Le dernier Duc de Poméranie étant mort sans enfants durant la guerre que faisait en Allemagne Gustave Adolphe Roi de Suède; cette partie à lui échue par sa femme, vint à la couronne de Pologne, et s'appelle Prusse Royale, pour la distinguer de l'autre appartenante à l'Electeur de Brandebourg qui s'appelle Ducale.
Le Duché de Curlande est encore du débris de l'Ordre Teutonique, car le Grand Maître Jean Kaëlteler Gentilhomme du pays de Clèves, ayant embrassé la religion luthérienne, et étant devenu Duc de Curlande, il a rendu ce pays qui confine la Prusse successif à ses descendants par l'investiture qu'il en reçu.
La Commanderie de Mariembourg est maintenant chef de tout l'Ordre. Le Grand Maître écartèle ses Armes de celles de la Religion, qui sont d'argent à la Croix de sable, de celles de sa propre famille, et de celles de Prusse, en mémoire de la possession qu'en ont eu ses prédécesseurs.
Ces Chevaliers doivent faire preuve de seize quartiers d'ancienne Noblesse; et s'ils se marient, ils font preuve de chasteté conjugale.

De l'Ordre militaire et Hospitalier de Saint-Antoine d'Éthiopie, de Vienne, et de Saint-Russi.

Andreas Menda dans son traité intitulé de Ordinibus militaribus disquisitiones canonica, morales et historicae, du Peyrat et plusieurs autres Auteurs font mention de l'Ordre militaire et Hospitalier de Saint-Antoine d'Éthiopie, qu'on dit être établi dès l'an 370 pour combattre les ennemis de la Foi Chrétienne, et spécialement pour assister et loger les malades du feu Saint-Antoine. C'est faire remonter cet Ordre jusqu'au temps de la mort de Saint-Antoine, qui arriva l'an de notre salut 371 mais la vérité est qu'il est beaucoup plus moderne: aussi Panune demeure d'accord qu'il commença de paraître en Europe en 1095. Gaston et Girard père et fils qui se dévouèrent au soulagement du feu Saint-Antoine, en ayant établi l'institut en Dauphiné, comme l'assurent le Cardinal César Baronius, et Henry Sponde Évêque de Pamiers l'an 1121 ils fondèrent un Prieuré en un lieu appelé la Mote, dans le pays Viennois: cette maison fut convertie en Abbaye l'an 1207 par le Pape Boniface VIII et les personnes malades du feu Saint-Antoine s'y retiraient, comme rapporte Albertus Mireus.
Les Hospitaliers d'Éthiopie ont toujours professé la Règle de Saint-Basile, et s'occupaient dans les armées aux oeuvres de charité envers les malades, et à la sépulture des morts. Ils y font preuve de Noblesse et de vertu: et s'ils ne sont Nobles, le Prince des Abissins les anoblit, et leur donne immédiatement des Armoiries, ce qui est tiré des Archives de cet Ordre.
Ce fut à la diligence d'un nommé Jessé, que les Reliques du corps de Saint-Antoine furent apportées de Constantinople en Dauphiné: néanmoins ceux de Montmajour d'Arles, Ordre de Saint-Benoît, ont contesté ces Reliques, disant qu'elles étaient en leur Abbaye, comme rapporte César Nostradamus en son Histoire de Provence. Il y a eu pour ce différend des armées sur pied, les Dauphinois et les Provençaux soutenant respectivement qu'ils avaient les Reliques de ce Saint Hermite. Quoi qu'il en soit, ceux de Dauphiné ont le Chef d'Ordre chez eux.
Il y en avait deux Commanderies à Paris, dont l'une subsiste, portant le nom de Saint-Antoine. L'autre appelée de Saint-Magloire, est passée dans l'Ordre de Saint-Benoît et enfin en la Congrégation de l'Oratoire pour la Maison seulement, car l'Abbaye ou Commanderie a été réunie à l'Archevêché de Paris pour le revenu. Il y en a un autre à Rouen, qui est l'Hôpital de Saint-Thomas le Martyr, qui appartenait à l'Ordre des Billettes, que le Roi Charles VI donna à l'Ordre de Saint-Antoine l'an 1397 pour recueillir les malades du feu Saint-Antoine; ce que le Roi François 1er confirma l'an 1538 avec le privilège d'une quête que ces Hospitaliers peuvent faire pour la nourriture d'un Pourceau qu'on appelle le Pourceau de Saint-Antoine.
Ces Hospitaliers sont sous la règle de Saint-Augustin, et portent le Tau bleu ou de couleur céleste sur un habit noir, comme ceux d'Éthiopie.
Ce Tau est une lettre Gothique, qui marque qu'en portant ce signe on était préservé de la mort, comme nous apprend le Prophète Ézéchiel et l'ordonnance fut baillée aux Anges d'exempter de la mort le peuple Hébreu qui avait cette marque sur le front; ce qu'on peut lire dans Saint-Chryfostome, Saint-Ambroise et Beda. Mais il y en a qui n'approuvant pas cette interprétation, disent que ce Tau est une potence ou bâton dont se servaient les malades dans les Hôpitaux de Saint-Antoine, pour aider à leur convalescence.
Il y a un autre Ordre Hospitalier sous la règle de Saint-Augustin en Dauphiné dans le Diocèse de Valence, qui porte le titre de Saint-Russi, qu'on dit fils de Simon le Cirenien qui aida à porter la Croix de Notre-Seigneur.
Sous Raimon l'an 1158, la Maison de Saint-Russi commença d'avoir titre d'Abbaye. Ce même Ordre a eu cours dans les Diocèses d'Avignon, d'Arles, et de Lyon: Plusieurs Auteurs en parlent, comme Albertus Mireus, Renatus Chopinus, Oldradrus, Aimarus Falco. Et Petrus Grisius, dit qu'il se tint un Synode Provincial de cet Ordre l'an 1337 pour y faire des Règlements.
Outre ces Hospitaliers, des Ordres d'Éthiopie, de Vienne, et de Saint-Russi, il y a encore d'autres de Chanoines Réguliers, qui professent l'Hospitalité, et qui prennent Saint-Antoine pour leur Patron.

De l'Ordre Hospitalier du Saint-Esprit à Rome.

L'Ordre des Chevaliers du Saint-Esprit de Rome fut érigé par le Pape Innocent III l'an 1198 ils sont nommés Frères Hospitaliers, et sont logés près du Tibre. On met en leur Hôpital les enfants exposés. Ils portent la Croix blanche, selon Daviti. Les autres qui ont écrit des recherches de cet Hôpital, disent qu'il a vingt millions de revenu.

De l'ordre des Chevaliers Hospitaliers du Croissant et de l'Étoile en Sicile.

La Milice du Croissant et de l'Étoile fut instituée par Charles de France Roi de Sicile, Comte d'Anjou, à Messine l'an 1268. Il bailla pour ornement à ces Chevaliers un collier d'or plein de fleurs-de-lis et d'Étoiles d'où pend un Croissant à l'extrémité; c'était pour la défense de la Foi, pour donner l'Hospitalité aux pèlerins, et avoir soin de la sépulture des défunts. On n'y devait admettre que des gens illustres en Noblesse et en valeur. Le Pape Clément IV confirma cet Ordre, dont fait mention Franciscus Mennenius.

De l'Ordre Hospitalier de Sainte Brigide, ou de Brecian en Suède.

Sainte Brigide institua l'Ordre de Brecian en Suède à son retour de Jérusalem l'an 1369 sous la règle de Saint-Augustin. Cet Ordre fut confirmé par le Pape Urbain V. Son institut est de s'opposer aux Hérétiques, d'exercer l'Hospitalité, d'ensevelir les morts, de protéger les veuves et les orphelins.
La marque de cet Ordre est la croix bleue, et une langue de feu, symbole de la charité. Antonius Hianus, et Antonius Boisius, en font mention.
Il y a des Moines de Sainte Brigide aux Pays-Bas qui portent une Croix rouge au pied long, et un besant blanc, ou plutôt une Hostie au milieu des croisillons.
Volateranus parle de cette Sainte et de ses huit enfants. Le Schisme à aboli cet Ordre Hospitalier en Suède; mais il s'est maintenu en Flandres.

De l'Ordre Hospitalier des Martyrs Saint-Côme et Saint-Damian en Palestine.

L'Ordre Hospitalier sous le titre de Saint-Côme et Saint-Damian est institué pour assister les pèlerins étrangers qui tombent malades en la terre-Sainte, envers lesquels les Chevaliers exercent toute sorte d'oeuvres de charité. Le Pape Jean XXII en 1410 confirma leur institut suivant la règle de Saint-Basile qu'ils avaient prise. Ils portent la croix rouge et les images de Saint-Côme et de Saint-Damian renfermés dans un cercle. Andreas Mendo, Hieronymus Roman, et Josephus Micheli, remarquent les prérogatives de cet Ordre.