ORNEMENTS EXTERIEURS par M. Jouffroy d'ESCHAVANNES

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Extrait du livre de Jouffroy d'Eschavannes : Traité complet de la Science du Blason à l'usage des Bibliophiles,
Archéologues, Amateurs d'objets d'art et de curiosité, Numismates, Archivistes
PARIS - Librairie ancienne et moderne - Edouard Rouveyre - 45, rue Jacob, 45 - 1885

TRAITE DU BLASON

ORNEMENTS EXTERIEURS DE L'ECU, TIMBRES, CASQUES ET HEAUMES

COURONNES

LAMBREQUINS, MANTELETS ET BOURRELETS

CIMIERS

SUPPORTS ET TENANTS

CRI D'ARMES, DEVISES ET PAVILLONS

COURONNES

a couronne a toujours été un emblème de souveraineté et de commandement, et tous les peuples en ont orné la tête de leurs chefs. Homère s'extasie devant les couronnes des rois dont il peint les prouesses. Virgile cite la couronne d'or du roi Latinus, lorsqu'il régla les conditions du combat entre Enée et Turnus. Diodore de Sicile dit que le casque d'Alexandre était orné d'une couronne d'or, et l'empereur Aurélien, si l'on croit Aurélius Victor, portait une couronne d'or rehaussée de pierres de grand prix.

Les premiers rois de France n'avaient pour couronnes que des cercles d'or massifs, posés sur la tête nue ou sur le casque. Ce fut Charlemagne qui le premier se couvrit d'une véritable couronne ornée de fleurons et de pierres précieuses. Vulson dit l'avoir vue conservée dans le trésor de Saint-Denis et il en donne un dessin qu'il assure être fort exact, ajoutant que cette couronne servait au sacre des rois.

Tous les nobles titrés ont, à l'imitation des souverains, voulu se parer de couronnes, qu'ils plaçaient sur les heaumes. La coutume de joindre toujours ces deux ornements a été abandonnée et ne se pratique plus que dans certains cas laissés d'ailleurs à la fantaisie. On se contente presque généralement aujourd'hui de surmonter l'écu d'une couronne.

A différentes reprises les souverains ont dû réprimer l'usurpation des couronnes par des personnes que leur titre n'autorisait pas à les porter. Ainsi des comtes prenaient des couronnes de marquis ou de ducs, et de simples gentilshommes voulurent même timbrer leurs armes de couronnes appartenant aux plus hauts titres. L'arrêt de 1663 portant défense à tout gentilhomme non titré de prendre la qualification de duc, marquis, comte, etc..., sous peine de 1500 livres d'amende, fit cesser l'abus pendant quelque temps; mais il se renouvela bientôt, et l'on pourrait croire aujourd'hui qu'il n'y a plus de règles établies, tant les usurpations de ce genre ont été nombreuses. Espérons qu'à défaut de dispositions législatives, les sarcasmes publics feront justice de ces usurpations qu'on ne saurait trop flétrir. (J'ai vu souvent des familles prendre un titre auquel elles croyaient de bonne foi avoir des droits, parce qu'elles possédaient un cachet de famille, timbré d'une couronne. On doit regarder comme un devoir de les éclairer à cet égard, et de leur faire rejeter toute prétention fondée sur un document aussi futile et si contestable).


Tiare papale

La couronne des papes ou tiare se compose d'une toque d'or, ornée à son sommet d'un globe surmonté d'une croix. Elle est environnée d'une triple couronne d'or, et laisse pendre deux cordons semés de croisettes. Les trois couronnes représentent le pape comme le souverain sacrificateur, le grand juge, et le seul législateur des chrétiens. Souverain spirituel de tous les peuples catholiques, représentant de Dieu sur la terre, le pape est considéré comme la plus haute puissance qui, après Dieu, s'étend sur l'humanité. La tiare est aussi appelée Regnum.

La couronne des empereurs est couverte et rehaussée en façon de mitre, ayant au milieu des deux pointes un diadème surmonté d'une boule ronde et d'une croix de perles. Les empereurs d'Allemagne recevaient cette couronne des mains du pape, pour indiquer qu'ils étaient empereurs du monde chrétien.

L'empereur Napoléon avait pris une couronne fermée dont les cercles étaient soutenus alternativement par un fleuron et par une aigle.


Couronne impériale

Couronne royale de France

Couronne royale d'Angleterre

Couronne des dauphins de France

Couronne des princes du sang

Couronne des ducs

Couronne des comtes

Couronne des vidames

Couronne des chevaliers

Mortier des chanceliers

Chapeau des cardinaux

Chapeau des évêques

La couronne royale de France était formée d'un cercle surmonté de huit fleurs de lis, au pied nourri, servant de bases à des diadèmes perlés qui se réunissent au sommet par une fleur de lis double.

Les rois des autres puissances remplacent les fleurs de lis par des fleurons, et surmontent les diadèmes d'un globe et d'une croix.

La couronne d'Angleterre prend des croisettes pattées au lieu de fleurons, et est surmontée d'un léopard.

Le grand-duc de Toscane portait une couronne relevée sur son cercle de plusieurs pointes, semblables à celles des couronnes antiques, mais un peu recourbées et surmontées, une sur deux, de fleurs de lis au pied nourri. On y ajoutait deux grandes fleurs de lis épanouies de Florence.

Les dauphins de France portaient une couronne royale formée seulement de quatre diadèmes. Chacun de ces diadèmes avait la forme d'un dauphin.

Tous les autres enfants de France n'avaient que le cercle d'or surmonté de huit fleurs de lis sans diadème.

Les autres princes du sang n'avaient que quatre fleurs de lis et quatre fleurons.

Les princes du Saint-Empire se servent pour timbrer leurs armoiries d'un bonnet d'écarlate rehaussé d'hermines, diadémé d'un demi-cercle d'or orné de perles, et surmonté d'un globe, comme celui des empereurs.

Les ducs, en France, portent leur couronne, d'or, rehaussée de huit fleurons et enrichis de pierreries et de perles.

Celle des marquis est surmontée de quatre fleurons, séparés chacun par trois perles qu'on posait autrefois sur une même ligne, mais qui sont réunis aujourd'hui en forme de trèfle.

La couronne des comtes n'a point de fleurons; elle est rehaussée de seize grosses perles dont neuf visibles, portées chacune sur une pointe. Quelques anciens héraldistes voulaient que cette couronne fût réservée aux comtes souverains, et que pour celle des comtes non souverains les perles fussent posées immédiatement sur le cercle. Cette distinction n'a pas été suivie.

La couronne de vicomte n'est rehaussée que de quatre perles, dont trois visibles.

Celle des vidames est surmontée de quatre croix pattées.

Les barons n'ont qu'un cercle d'or émaillé, environné d'un bracelet ou chapelet de perles. Ce chapelet était souvent accordé par les souverains comme récompense honorifique. Edouard, roi d'Angleterre, en donna un à Eustache de Ribeaumont, son prisonnier, et lui fit remise de sa rançon en honneur de la bravoure qu'il avait déployée.

Les chevaliers bannerets timbraient leur écu d'un cercle d'or orné de perles.

Le bourrelet n'était qu'un rouleau de ruban aux couleurs de l'écu, souvent même aux couleurs qu'affectionnait la dame du chevalier. On le plaçait sur le casque comme simple ornement auquel n'était attaché l'indication d'aucun titre.

Les chanceliers ou gardes des sceaux de France posent sur le casque dont ils timbrent leur écu un mortier rond, de toile d'or, brodé de même et rebrassé d'hermines.

Les présidents à mortier des cours de parlement ont un mortier noir, rehaussé de deux larges galons d'or.

Les ecclésiastiques ont aussi un ornement indiquant les dignités dont ils sont revêtus. C'est un chapeau surmontant la couronne et l'écusson.

Les cardinaux ont le chapeau rouge à large bord, accompagné de cordons de même couleur entrelacés et terminés par cinq houppes.

Les archevêques prennent un chapeau à grands bords qui couvre entièrement l'écu comme celui des cardinaux. Il n'en diffère que par la couleur verte, et les pendants à quatre houppes au lieu de cinq.

Le chapeau des évêques est aussi de sinople et les pendants à trois houppes.

Les abbés et protonotaires portent sur l'écu de leurs armes un chapeau noir dont les cordons entrelacés et pendants se terminent par deux houppes de même couleur.

Les prieurs et abbesses entourent leurs armoiries d'un chapelet ou patenôtre.

L'empereur Napoléon avait substitué aux couronnes des nobles titrés des toques surmontées de plumes dont le nombre indiquait la dignité de celui qui les portait. Cet usage ne s'est pas conservé, et les familles anoblies ou titrées par Napoléon ont repris les anciennes couronnes. Cependant, comme les monuments du temps portent ces insignes, il est bon de les faire connaître.


Les princes grands dignitaires avaient une toque de velours noir, surmontée de vair avec porte-aigrette d'or surmontée de sept plumes.

Les ducs ne se distinguaient que par la toque retroussée d'hermine au lieu de vair.

Les comtes avaient la toque de velours noir, retroussée de contre-hermine, avec porte-aigrette en or et argent surmontée de cinq plumes.

Les barons retroussaient la toque de contre-vair; porte-aigrette en argent, avec trois plumes.

Les chevaliers portaient la toque de velours noir retroussée de sinople, surmontée d'une aigrette blanche ou d'argent.

On peut enfin citer les couronnes murales qui timbrent ordinairement les armoiries des villes.


Couronne royale

Couronne ducale de Toscane

Couronne des enfants de France

Couronne des princes du Saint-Empire

Couronne des marquis

Couronne des vicomtes

Couronne des barons

Bourrelet

Mortier des présidents

Chapeau des archevêques

Quant aux couronnes navales et vallaires que plusieurs auteurs ont données, elles ne sont presque d'aucun usage en blason.

Les veuves entourent leur écu de cordelières de soie noires et blanches entrelacées. Cette coutume est due à la reine Anne de Bretagne, qui l'adopta après la mort de son premier mari Charles VIII.

Les filles, qui, nous l'avons déjà dit, portent l'écu en losange, le placent dans une guirlande de fleurs.